Tranduction

Des pionniers de la RSE en Afrique

Les responsables du projet sur place, MM Basil TOSSOU et Olivier SOKPOH sont à l'origine du projet Togovert, inscrit dans la RSE africaine. En effet, la société Togovert tire les leçons des expériences en Europe et tiens en compte la tradition en Afrique.


La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) est une réalité, une nécessité, partout dans le monde. L'Afrique commence seulement à faire la synthèse entre sa propre culture et les concepts occidentaux. Nous voulons concrétiser notre apport à travers 7 propositions:


1. Donner aux diasporas africaines le rôle de transmettre les pratiques responsables occidentales en Afrique et les pratiques responsables africaines en Occident.


2. Élaborer avec les managers africains et occidentaux travaillant en Afrique des procédures permettant d’adapter les exigences occidentales de RSE aux contextes culturels africains.

3. Définir, avec les consultants, les formateurs et les qualiticiens mettant en œuvre des démarches de RSE en Afrique, une approche interculturelle de la norme ISO 26000.


4. Promouvoir au niveau international, avec les entrepreneurs africains engagés dans une démarche de RSE, les modes d’organisation, de management et de gestion africains de l’entreprise.


5. Fonder l’approche interculturelle de la RSE sur l’expertise de chercheurs africains et occidentaux spécialisés dans le domaine de la RSE et de l’interculturalité en Afrique.


6. Sensibiliser les directions des entreprises internationales implantées en Afrique aux enjeux d’une hybridation nécessaire des pratiques responsables africaines et occidentales.


7. Informer les sociétés civiles africaines des avancées en matière de RSE en Afrique, en mobilisant les médias africains et occidentaux autour des démarches interculturelles et responsables dans le monde de l’entreprise.




"La RSA et les obstacles au développement en Afrique"
Ce livre nous apprend à bien diriger notre activité.  Les auteurs :
Alexandre Wong est chercheur associé en philosophie (UPR 76 CNRS, groupe THETA), consultant (Les Jardins de la Cité), docteur en sciences sociales.
Urbain Kiswend-Sida Yameogo est étudiant-chercheur en cotutelle de thèse UQAM – Université Paris-Est.

Voici la liste des obstacles à bien saisir pour mieux comprendre la réalité de l'Afrique et créer une stratégie concrète pour avancer dans le développement durable :

=Marginalisation économique
L’Afrique pèse moins de 2 % dans le commerce mondial. Divers facteurs généraux sont invoqués pour expliquer la situation de marginalisation dans laquelle elle se trouve :
– les réformes politiques et juridiques sont très souvent parcellaires et non coordonnées, ce qui conduit à une multiplication de cadres institutionnels et de textes juridiques qui ne trouvent pas à s’appliquer ;
– l’Afrique a une longue tradition de production et de marchés à petite échelle. Cette caractéristique s’explique par une faible industrialisation et par le poids important de l’économie informelle
– beaucoup de pays africains disposent d’une main-d’œuvre abondante et peu coûteuse. Cependant, une bonne partie de cette main-d’œuvre n’est pas qualifiée ou ne dispose pas de compétences en adéquation avec les besoins du marché;
– l’absence ou la faiblesse des contraintes érigées par les législations peut constituer plus un risque qu’une opportunité pour les entreprises nationales et étrangères ;
– les économies continuent à dépendre des matières premières agricoles et minières exportées sans transformation et donc sans valeur ajoutée, sans compter leur vulnérabilité aux aléas climatiques du fait de la nature des produits agricoles exportés ;
– les marchés des pays développés sont difficiles d’accès, en particulier dans le domaine agricole, en raison des normes sanitaires et techniques en vigueur dans ces pays ;
– les IDE (Investissements directs étrangers) étant orientés vers les pays qui disposent de ressources pétrolières et minières, leur répartition est inégalitaire ;
– les pays africains ont établi des liens économiques plus étroits avec leurs anciennes puissances coloniales respectives qu’avec d’autres pays africains ;
– l’intégration des Africains aux organisations de réflexion sur la gouvernance mondiale et aux institutions internationales de recherche académique est faible.

=Illégalité
Les contournements législatifs, l’exploitation des failles de la réglementation, notamment en matière fiscale, ou le lobbying favorisant l’apparition d’exigences légales au rabais constituent des pratiques qui ne sont pas méconnues dans le milieu des affaires africain. Des entreprises nationales ou multinationales ont été accusées de faire et de défaire les pouvoirs locaux ou de piller les ressources locales en profitant de situations échappant au contrôle des gouvernements. En octobre 2002, un groupe d’experts des Nations Unies enquêtant sur l’exploitation illégale des ressources en République démocratique du Congo a publié un rapport qui dénonce les activités des sociétés engagées dans le commerce très souvent illégal des diamants et l’extraction d’autres ressources (1)

=Opacité
Les réglementations et législations organisent la reddition des comptes financiers dans le cadre des obligations comptables à la charge des entreprises vis-à-vis de l’État et de ses propriétaires (les actionnaires). Cependant, les réglementations sont muettes quant à la reddition des comptes aux autres parties prenantes de l’entreprise sur ses performances environnementales et sociales. La faiblesse de l’influence des parties prenantes laisse à l’entreprise africaine, en dehors de toute pression externe (de donneurs d’ordres, du groupe ou de la maison mère), la latitude de s’enfermer dans l’opacité complète quant aux impacts de ses activités sur la société.

=Corruption
Beaucoup d’États ont adhéré à la Convention des Nations Unies contre la corruption et mis en place des structures et mécanismes de surveillance et de répression de la corruption. Cependant, l’indice de perception de la corruption de Transparency International montre que beaucoup d’États africains connaissent la corruption. L’indice de corruption des pays exportateurs (ICPE) révèle que les multinationales sont souvent à la base des pratiques de corruption (2)

=Travail des enfants
Les rapports de plusieurs organisations non gouvernementales témoignent de trafics et d’utilisation d’enfants dans les plantations de cacao, de café, de coton, dans l’exploitation minière, etc. (3). L’Organisation Internationale du travail (OIT) a publié en 2010 une étude détaillée sur le travail des enfants dans le monde et indique qu’en Afrique subsaharienne une augmentation du taux d’activité des enfants a été enregistrée entre 2004 et 2008 (28,4 % en 2008 contre 26,4 % en 2004) (4)
.
=Complicité dans les abus commis par des tiers et collusion
En vertu du deuxième principe du Pacte mondial, les entreprises devraient s’assurer qu’elles ne sont pas complices de violations des droits humains. La complicité dans les abus commis par des tiers en Afrique prend plusieurs formes :
– l’implication directe ou indirecte des partenaires d’affaires,
notamment des filiales, de la chaîne de sous-traitance ou des fournisseurs, dans des violations (emploi des enfants, formes de travaux forcés, affaires de corruption, etc.) ;
– les violations commises dans le cadre d’opérations de sécurisation et de protection assurées par des brigades de sécurité privées pouvant agir dans l’impunité totale ;
-les opérations dans les zones de conflits ou les liens avec les groupes armés ou avec les pouvoirs publics auteurs de violations des droits humains.

=Accès aux médicaments, maladies pauvres ou orphelines, essais thérapeutiques
Les poursuites judiciaires engagées par trente-neuf grands groupes pharmaceutiques contre le gouvernement sud-africain pour le non-respect de droits de propriété intellectuelle lié à la vente en Afrique du Sud de médicaments génériques contre le sida (poursuites abandonnées en avril 2001) révèlent une primauté des enjeux économiques internationaux sur les enjeux sociétaux dans le domaine de la santé en Afrique. S’explique en ce sens le manque d’intérêt des laboratoires de recherche des grands groupes pharmaceutiques pour des maladies négligées ou orphelines dont le traitement est jugé peu rentable. De grands groupes pharmaceutiques ont de surcroît été accusés d’administrer à certaines populations africaines des essais thérapeutiques.

=Expropriation, exploitation des ressources naturelles locales, biopiratage
Les zones riches en ressources naturelles pétrolières et minières sont le lieu d’expropriations et d’exploitation des ressources locales. Selon Amnesty International, dix ans après les événements qui ont opposé en 1995 le peuple Ogoni et Shell Petroleum Development Corporation, l’exploitation pétrolière dans le delta du Niger continue d’entraîner des spoliations, des injustices et des violences : les riverains desinstallations du delta du Niger ne sont pasindemnisés quand ils sont expulsés des champs d’exploitation ; ils sont même parfois menacés d’être châtiés quand ils font obstacle à la production de pétrole ou lorsqu’ils protègent des fauteurs de troubles (5). Les savoirs des communautés indigènes notamment en matière médicale, sont aussi frauduleusement exploités ou brevetés (6).

=Limitation des droits sociaux
Le rapport 2010 de la CSI (Confédération syndicale internationale) indique : « Les droits syndicaux fondamentaux sont garantis dans les Constitutions de nombreux pays africains mais, dans la pratique, ces dispositions restent souvent lettre morte. Le dialogue social est souvent limité ou inexistant et les revendications des travailleurs et de leurs représentants rencontrent fréquemment l’indifférence ou le rejet des employeurs et des autorités. De plus, même lorsqu’une convention collective a été conclue, il arrive souvent qu’elle ne soit pas respectée. Ce problème se pose en particulier dans des pays comme le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Liberia, le Nigeria et la Tanzanie. »

=Déforestation, désertification
La déforestation et la désertification sont le fait aussi bien des usages domestiques que de l’exploitation industrielle des forêts. Selon le PNUE (Programme des Nations unies pour l’environnement), l’Afrique perd sesforêts au taux de 0,8%par an (5 262 000 ha).

=Déchets
Les exportations en Afrique de déchets industriels présentent un danger dont les entreprises exportatrices des pays industrialisés et les entreprises ou autorités publiques des pays importateurs ne tiennent pas toujours compte (7).

=Mauvaise qualité des produits
La faiblesse des ressources financières conduit les populations à accorder plus d’importance au prix qu’à la qualité. L’Afrique est de plus en plus la destination de produits usagés (ordinateurs récupérés et réemployés, véhicules de seconde main ou d’occasion à l’origine d’importantes pollutions).

=Manque de dialogue avec les communautés locales
La relation avec les communautés locales est la condition aussi bien de l’acceptation de l’entreprise et de ses activités que de l’efficacité de sa contribution au développement de l’environnement social dans lequel elle opère. Le manque de dialogue parfois observé entre les entreprises et les communautés locales favorise un climat de violence (répressions des populations par les autorités publiques, rapts d’employés, attaques contre les installations pétrolières, etc.) (8).

La RSE, une notion peu connue, un débat public émergent en Afrique (9)

=====
1. Rapport final du groupe d'experts sur l'exploitation illégale des ressources
naturelles et autres formes de richesse de la République démocratique du Congo,
S/2002/1146.
2. L'ICPE évalue la propension des entreprises des plus grands pays exportateurs à verser des pots-de-vin à l'étranger. Selon Huguette Labelle, présidente
de Transparency International, « L'ICPE démontre que de nombreuses sociétés
des plus grands pays exportateurs continuent d’avoir recours aux pots-de-vin
pour remporter des contrats à l'étranger, en dépit de la reconnaissance de l'impact destructeur de cette pratique sur la réputation des entreprises et les communautés locales » (communiqué de presse du rapport 2008 sur l’ICPE). Dans
le cadre de l'Union africaine (UA), une commission spéciale de lutte contre la
corruption a été créée en 2010
3.- Le Travail des enfants en Afrique : problématique et défis, Banque mondiale, FINDINGS, 194, novembre 2001 : « Autour de 5 millions d'enfants sont engagés dans des travaux rémunérés par l'agriculture de rente. La situation est particulièrement dure pendant les périodes de récoltes. Au Kenya, 30 % de la main-d'œuvre de récolte du café sont des enfants, pendant que 25 000 écoliers travaillent à risque dans les mines et plantations tanzaniennes. Beaucoup de garçons du Mali, du Burkina Faso, du Niger, du Ghana, du Togo et du Bénin émigrent pour travailler dans les plantations en Côte d'Ivoire et au Nigeria, à côté d'enfants réfugiés venant du Liberia et de Sierra Léone. »
4.- Accelerating action against child labour. Global Report under the follow-up to the ILO Declaration on Fundamental Principles and Rights at Work, International Labour Conference, 99th session 2010, report I(B).
5.- Au Nigeria, des accusations ont par exemple été portées contre la compagnie pétrolière américaine Chevron, jugée complice de la répression sanglante menée par l'armée nigériane lors de manifestations sur le terminal pétrolier de la société Chevron Nigeria d'Escravos le 4 février 2005 (Amnesty international, Nigeria – Pétrole et droits humains : 10 ans de violations renouvelées, index AI : AFR 44/020/2005, 3 novembre 2005). Chevron ainsi que l'agence d'aide au développement des États-Unis USAID ont annoncé en février 2011 la création d'un fonds de 50 millions de dollars destiné au développement de la région pétrolifère du Nigeria. Cet argent est destiné à des programmes visant à favoriser le développement économique, à renforcer les capacités des institutions gouvernementales et des organisations de la société civile, ainsi qu'à réduire la violence dans la région.
6.- Le Nigeria (l'État de Kano) a par exemple engagé des poursuites contre Pfizer, accusé d'avoir utilisé secrètement des enfants malades comme cobayes pendant la pandémie de méningite de 1996.
7. Le déversement en Côte d'Ivoire en 2006 de 581 tonnes de déchets toxiques pétrochimiques en provenance d'Europe par le Probo Koala en est une illustration.
8. La relation entre Shell Petroleum Development Corporation et les riverains des installations pétrolières du delta du Niger en est un exemple.
9. Source : réponses au questionnaire construit par U. K.-S. Yaméogo dans le cadre de son état des lieux de la RSE en Afrique. 
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